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Maurice Najman Une figure de la génération lycéenne de Mai 68par Ariane CheminJournaliste, écrivain, créateur, en 1968, des comités d'action lycéens (CAL), Maurice Najman est décédé, jeudi 4 février, des suites d'une hépatite C. Il était né le 7 décembre 1948, à Paris, dans une famille juive polonaise. Son père, un militant communiste, meurt jeune. Sa mère, Solange , est une rescapée d'Auschwitz. Sa grand-mère ne parlait que le yiddish, une langue qu'il apprend et n'oubliera jamais. En 1965, il débarque au lycée Jacques-Decour, plein d'idées et d'idéaux, déjà « viré » des Jeunesses communistes (JC), auxquelles il avait adhéré un an plus tôt. A la rentrée 1966, avec certains de ceux qui compteront plus tard dans l'histoire de Mai 68 - tel Michel Recanati, qui se suicidera à trente ans -, il crée à Jacques-Decour le premier comité Vietnam lycéen. Cette même année, il se rapproche d'un petit groupe de militants trotskistes regroupés derrière l'un des fondateurs de la IVe Internationale, le Grec Michel Raptis - dit « Pablo » -, décédé il y a trois ans. Il adhère en 1967 à cette tendance tiers-mondiste, autogestionnaire dont sortira, en 1968, l'Alliance marxiste-révolutionnaire (AMR). Avec ses copains de l'AMR et de la Jeunesse communiste révolutionnaire (JCR), il est de tous les coups. Au début de l'année 1968, il se bat pour la réintégration de Romain Goupil, exclu du lycée Condorcet pour agitation politique, ce qui donnera lieu à la première « manif » lycéenne. Il fait aussi partie du groupe de militants qui, le 20 mars, au nom du refus de la guerre du Vietnam, brise les vitrines de l'American Express. Cette action précédera la naissance, le 22 mars, à la faculté de Nanterre, au « Mouvement » du même nom. En avril, il imagine, à Jacques-Decour, le premier comité d'action lycéen (CAL). La France en est bientôt couverte, mais ce succès avive des rivalités : les révolutionnaires austères de la JCR s'opposent aux « amateurs » de l'AMR, qui ne cachent pas leur amour du rock et des plaisirs. Dans Mourir à trente ans, le film-culte de Romain Goupil sur cette époque et cette génération, on suit les manoeuvres de Recanati pour écarter Najman du premier rang de la manifestation du 13 mai 1968. L'ordre revenu, il continue toujours à rêver de « mouvements de jeunesse » et de révolutions. En 1973, il est en Amérique latine et ramène un livre, Le Chili est proche, publié chez Maspero (1974). Il est au Portugal, pendant la Révolution des oeillets, rêve d'un socialisme autogéré en Algérie, n'oublie pas les ouvriers de Lip et défend la candidature de Charles Piaget à l'élection présidentielle de 1974. Début 1975, il rejoint le PSU avec l'AMR, le quitte trois ans plus tard, et soutient dès le départ l'éphémère candidature de Coluche à l'élection présidentielle de 1981. Passionné par ce qu'il appelle, le premier, les « nouveaux mouvements sociaux », il explique à ses copines qu'il faut militer au Mouvement de libération des femmes (MLF), n'en déplaise à « tous ceux qui n'ont que le mot lutte de classes dans la bouche ». Fin 1994, il est l'un des premiers à squatter la rue du Dragon, avec son ami Jean-Baptiste Eyraud, le président de Droit au logement. En 1996, il rejoint la gauche française partie au Mexique à la rencontre du « sous-commandant » Marcos. Bavard, jamais lassé de raconter ses bonnes histoires vécues, Maurice Najman était toujours en retard, toujours débordé, toujours agacé que ses amis lui reprochent de gâcher son talent. Après quatre ans passés à Libération, il « pigeait » ici et là, avait toujours un « papier » en retard pour Le Monde diplomatique ou L'Evénement du jeudi, toujours un livre sur le métier, toujours un film documentaire en train. Il vit ainsi la chute du mur de Berlin, confesse Markus Wolf, le patron des services secrets est-allemands, se passionne pour les archives des ex-pays communistes. Dandy, Maurice Najman aimait aussi se montrer dans les films de ses amis. On l'aperçoit furtivement dans Irma Vep, d'Olivier Assayas ; on le reconnaît dans Passage secret, de Laurent Perrin ; on le verra dans le dernier film de Patrick Grandperret, tourné il y a peu à Cuba. On le voit aussi, évidemment, dans La mémoire est-elle soluble dans l'eau ?, tragi-comédie et docu-fiction de son petit frère, Charles, dit Charlie, hommage bouleversant à leur mère. Quand Romain Goupil lui demande, à l'automne 1998, de participer à son dernier long-métrage, A mort la mort, - « l'histoire d'une génération qui se retrouve plus souvent au cimetière qu'aux manifs » -, Maurice dit pourtant non. Le 12 décembre 1998, personne ne l'attend plus quand il arrive et rejoint la « famille », cette amicale où l'espérance est une éternelle inquiétude, pour la scène finale du film - la fin du triptyque ouvert par Mourir à trente ans. « C'est la scène du bal, lui avait dit son ami Romain. Une scène où on chante et où on danse. » Ariane Chemin LE MONDE , 6 février 1999 Voir également : Mort du journaliste Maurice Najman. Militant gauchiste ; il avait travaillé à «Libération». Militant gauchiste; il avait travaillé à «Libération» par Vincent Noce, Libération , 5 février 1999 Maurice Najman dans Paris.70.free.fr - Site tenu par Bernard Bacos - reprise de l'article de Vincent Noce du 5 février 1999 + photo Jean Segura. Maurice Najman (1948-1999) par Claude Kowal, Autogestion.asso.fr - 17 janvier 2013 Jean-Pierre Vigier, Daniel Cohn-Bendit et Maurice Najman à Paris en mai 1968. © Jean-Pierre Rey |
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