Caillois hypermédiatement ! l’INA inaugure la mise en application des techniques hypermédia, par Jean Segura

Avec « Roger Caillois », produit simultanément pour sa diffusion sur FR3 et en version interactive accessible sur la Toile, l’INA inaugure la mise en application des techniques hypermédia développées au sein de son studio multi-support. Une version de cet article a été publée dans le Magazine de l’Image et du Son (INA) n° 11 - 23 avril 1999

Pour les auteurs de ce documentaire à deux facettes, c’est aussi une nouvelle manière d’aborder leur travail : « une autre façon de penser s'ébauche ici, qui consiste à élaborer en même temps que le contenu d'un film – naturellement fondé sur une continuité – un autre scénario, interactif, donc discontinu » raconte Nicolas Stern coauteur et réalisateur d’Un Siècle d’écrivain : Roger Caillois qui voit là l’opportunité d’une multiplication des moyens d’expression.
Ainsi, comme l’estime Claude Guisard, chef de la Direction des programmes de création et de recherche (DPCR) un sujet devra être pensé très en amont afin de « pouvoir proposer à la fois des programmes multi-format qui prennent bien en compte la diversification des chaînes et des créneaux de diffusion; et aussi des programmes qui soient potentiellement multi-support, c'est à dire qu'ils offrent de nouvelles possibilités à un spectateur actif, en tirant parti des réseaux et des supports de type CD/DVD Rom et via une interface interactive ».
Munis des outils de navigation hypermédia fournis en même temps que l’œuvre, le « nouveau » spectateur va pouvoir aborder et approfondir le sujet selon ses propres critères et centres d’intérêt. Pour Bernard Rapp, directeur de la collection Un siècle d’écrivains sur France 3 (qui compte déjà 200 numéros), cela « va permettre aux téléspectateurs (.…) d’exercer un " droit de suite " après la diffusion du portrait. Ils pourront en effet accéder directement et en temps réel à des annexes éditoriales, biographiques et bibliographiques qu’ils souhaitent consulter. C’est un enrichissement notable et la réponse " automatique " au nombreux courrier que nous recevons chaque semaine ».

Dès que les téléspectateurs auront découvert le documentaire de 48 mn sur Roger Caillois le 9 juin sur France 3, ils pourront aller consulter les pages web qui lui sont consacrées sur les sites Internet de l’INA (www.ina.fr) et de FR3 (www.france3.fr). Plusieurs possibilités sont alors proposées à commencer par le visionnage de l’intégralité du film en mode « magnétoscope » numérique dans une fenêtre de la page web. Mais c’est surtout la partie interactive, déclinée en plusieurs fonctionnalités hypermédia, qui permet de naviguer librement à l’intérieur du programme, d’accéder à des versions longues d’extraits ou encore d’anoter soi-même le document. On découvre tout d’abord une transcription intégrale en mode texte de la bande son du film qui défile en même temps que l’image. Une échelle d’écoulement du temps située au bas de l’écran permet de franchir instantanément des passages en avant ou en arrière. Le système autorise d’ailleurs un double mode de lecture : soit un accès direct à un passage de la vidéo en cliquant dans le texte correspondant, soit un accès sur un extrait du texte en cliquant dans la fenêtre vidéo. On peut également faire des recherches plus précises par mots ou par noms auxquels correspondent des imagettes tirées du film : par exemple l’entrée « André Breton » indique les trois passages où ce nom est mentionné avec les imagettes relatives à ces passages. A chaque nouveau plan du film correspond une imagette, et l’ensemble des imagettes s’articulent sur un bandeau défilant en haut de l’écran, autorisant par simple cliquage à un accès direct à chaque début de plan. Il est également possible d’avoir un accès direct à des passages donnés via un index qui contient de nombreuses références comme les dates et noms de lieux, de personnalités ou d’œuvres, etc, ou encore via une « ligne de temps » des séquences décrivant les thèmes phares de l’écrivain (chez Caillois, on trouve le fantastique, les sciences, les minéraux ou les voyages) ou les périodes clés de sa vie (son enfance, l’engagement antifasciste, le surréalisme, etc.) L’un des autres avantages du support interactif en ligne est aussi de pouvoir accéder aux entretiens avec les différentes personnalités intervenant dans le film (comme Jean d’Ormesson ou Hector Biancotti), mais dans une version longue, non montée intégralement lors de son passage à l’antenne. Enfin, parmi les autres fonctions interactives, il est possible d’annoter soi-même le document en plaçant et nommant des marqueurs personnels sur la ligne temporelle de défilement de la vidéo, puis de les réutiliser pour un accès direct. Ainsi le spectateur peut lui-même composer ses cheminements à travers l’œuvre des auteurs, autre moyen de se la réapproprier. Comme le dit lui-même le réalisateur Nicolas Stern : « c’est une nouveau type d’excursion qui est proposé »

L’hypermédia est une méthode qui permet d’établir des liens entre différents médias (textes, sons, images, pages HTML, etc) et différents supports (hors ligne ou en ligne) et de pouvoir naviguer librement entre tous ces médias et supports grâce à ces liens.

Jean SEGURA